Contes de Tyranael by Elisabeth Vonarburg

Auteur:Elisabeth Vonarburg [Vonarburg, Elisabeth]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 1994-01-01T05:00:00+00:00

9

« C’est tout ? » proteste Mirat en constatant que je ne continue pas. « Il me semblait que c’était plus long. »

« C’est la version la plus ancienne, je l’ai dit. Elle date du temps où les Hébao vivaient seulement dans les forêts de l’Ouest au pied des Montagnes Rouges. »

« Et ce n’est pas vraiment l’histoire de Lileïniloo, remarque Tinguem. C’est l’histoire du temps où les Hébao ont commencé à s’installer dans les Plaines Bleues. Ils étaient trop nombreux pour continuer à vivre dans la forêt… »

« Et c’est l’histoire de leur découverte des arbres-Gomphali », ajoute Maroussia.

« Mais l’histoire de Lileïniloo, c’est quoi ? » demande Tikarek, agacé.

« L’autre histoire de Lileïniloo, ou la deuxième partie de son histoire, date de beaucoup plus tard, après l’ouverture du défilé de la Hache, après les premières conquêtes paalani, et même après la grande bataille de Hanatsan où pour la première fois les armées d’Aritu ont fait face aux armées de Paalu en bataille rangée et arrêté pour un temps l’expansion directe des Paalani vers l’ouest. Les Hébao avaient bien changé entre-temps. Et je ne suis pas sûre que ce soit seulement l’histoire de Lileïniloo non plus. Les contes ont une façon bien à eux de parler de plusieurs choses à la fois… »

***

Lileïniloo avait pensé retourner auprès de son clan pour raconter ce qu’elle avait trouvé au-delà de la forêt, mais elle se rendit bientôt compte qu’elle n’y retournerait pas de sitôt. C’était difficile d’établir des limites dans la prairie et de se dire « je vais jusque-là, et pas plus loin », surtout quand on était comme elle curieuse des plantes et des animaux qui s’y trouvaient : il y avait toujours une plante inconnue juste un peu plus loin, ou un arbre, ou bien Lileïniloo voyait voler au-dessus des herbes un nouvel oiseau, et il lui fallait absolument en savoir plus long sur lui et ses congénères…

Bientôt, elle dut agrandir sa hutte pour y ranger toutes les variétés de plantes qu’elle avait cueillies et fait sécher et les dessins d’animaux qu’elle avait tracés, avec soin et patience, sur des morceaux d’écorce collectés dans la forêt. Et à vrai dire, chaque fois qu’elle parlait avec l’arbre-Gomphal, elle se demandait si elle retournerait jamais auprès de son clan. Le Gomphal était vieux : il était allé jusque dans le nord de Hébu et il en était revenu ; il avait vu tant de choses ! Lileïniloo n’avait jamais pensé que le monde puisse être si vaste et si varié, et parfois, elle avait bien envie de continuer à marcher à travers la plaine bleue, jusqu’à la Grande Rivière, pour voir elle-même toutes les merveilles décrites par le Gomphal – des villes faites de pierre, des bateaux pour voguer sur l’eau ! Cela lui faisait bien un peu peur aussi, mais si elle avait survécu au pays des morts (même si elle ne pensait plus vraiment que c’était le pays des morts) et si elle était capable de vivre à

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